La Martinique, aussi appelée « Madinina, l’île aux fleurs » mesure 80 km de long et 39 km de large, est une île riche en paysages : des montagnes abruptes, des falaises, des collines verdoyantes et luxuriantes, des cascades, des plages de sable blanc, gris ou noir, des villages de pêcheurs…
Le patrimoine historique et culturel martiniquais est également riche et varié, des marchés, de nombreux musées et des ruines sont disséminés dans l’île.
Ce que j’ai pu apprécier sur l’île, plus que sur les autres, c’est l’art caribéen. C’est un carrefour culturel ouvert sur le monde. La Martinique foisonne d’artistes, peintres, sculpteurs, photographes… La street art est bien présente, par les fresques murales immenses, ou avec les installations monumentales sur les ronds-points.
Quand je lis les 10 incontournables de la Martinique sur les guides, je réalise que je n’en ai pas fait le quart pourtant j’ai l’impression d’avoir vécu beaucoup de choses et de façon très intense. Pas de check list à cocher pour dire « j’ai vu » ou « j’ai fait », ici j’ai ressenti et j’ai rencontré. Je le dois beaucoup à Rodrigue, un Martiniquais, dont nous avons fait la connaissance le premier jour, qui a nous a fait découvrir l’île de l’intérieur, à la locale, hors des sentiers battus, et qui nous a fait rencontrer des amis à lui extraordinaires.
J’en profite rapidement pour dire qu’il a comme projet d’être guide sur l’île, alors si vous prévoyez d’y aller, je ne peux que vous conseiller de faire appel à lui pour vivre des moments dont vous vous souviendrez longtemps (je vous donnerai ses coordonnées) !
Je pense aussi à Laure, l’amie de Sarah qui est venue une semaine, aux équipiers que nous avons rencontré sur les pontons eux aussi à la recherche de bateaux avec qui nous avons passé d’excellents moments improvisés, puis enfin aux régatiers de Ariane’s Cup que nous avons croisé à plusieurs reprises sur l’île et avec qui nous avons fait de belles fiestas. Toutes ces personnes ont fait de ce séjour un séjour mémorable.
C’est bien la première fois que je publie autant de photos qui ne soient pas des paysages, mais la Martinique pour moi c’est avant tout de magnifiques rencontres plus que des visites.
Tourisme vert (randonnées, trekking, canyoning, parcs naturels, forêts) et tourisme bleu (kayak, kite, planche à voile, plongée, snorkeling) respectueux de la Nature, je m’y suis sentie bien, en accord avec mes valeurs. La Martinique n’a cessé de me surprendre, pourtant ce n’était pas gagné !
Je suis arrivée en Martinique fatiguée, et même blasée, je savais que j’allais devoir rester quelques jours sur cette île le temps que les réparations soient terminées ou que je trouve un autre bateau, je n’avais ni grande envie, ni énergie, mais au final, cette île m’aura reboostée, et je n’avais plus envie de repartir. Il s’est vraiment passé quelque chose de magique sur cette île, je n’ai pas compris, mais elle m’a emportée, je sais qu’une partie de moi est restée là-bas. Il parait qu’on l’appelle « l’île des revenants », mais je comprends pourquoi.
Je suis restée un peu plus de deux semaines sur l’île, et contrairement à mes anciennes habitudes, je n’ai pas « dévoré » l’île, j’ai eu la chance de voir beaucoup de choses, mais je retiendrai surtout deux points.
Le premier, c’est l’accueil chaleureux et la bienveillance des locaux et le deuxième c’est leur état d’esprit. Ils peuvent paraitre nonchalants et au ralenti de prime abord, mais après les avoir rencontrés, j’ai compris qu’elle était leur philosophie, de se « hâter lentement » pour profiter de chaque instant intensément, même un déjeuner avec un pote qu’on a pas vu depuis longtemps est une bénédiction pour eux. Je me souviens d’un gars, qu’on surnomme « L’univers » (rien que ça !) avec qui j’ai parlé longuement du bien et du mal devant un concert de reggae, c’était surréaliste. Pourtant, tout ce qu’il me disait sonnait juste et m’a fait du bien.
Je peux en dire autant grâce à Rodrigue, qui nous a ouvert les portes de son monde, et fait rencontrer ses amis. J’ai pu échanger avec certains d’entre eux sur des sujets profonds. Ils sont connectés à l’univers et à ce qui nous entoure bien plus que nous, ils se fient beaucoup à leur intuition et leurs ressentis. Le must c’est Rodrigue et son ami Wally, qui ont vu juste en moi, et qui ont su en quelques heures aller chercher de profonds sentiments et pensées que je n’avais pas encore exprimés.
« Pani pwoblem » (pas de problème) qu’ils disent, tout est simple, facile et plusieurs fois je me suis vue dire que je me compliquais trop la vie et que je réfléchissais trop. Tous ces échanges dans des endroits à chaque fois merveilleux, la Martinique c’était une sorte de petite retraite spirituelle…
C’est marrant, j’ai remarqué plusieurs fois que lorsqu’on projette de faire des choses, on finit par y arriver mais pas de la façon dont on l’avait imaginée. J’avais envisagé d’aller apprendre à danser la salsa à Cuba, finalement c’est le zouk que j’ai appris en Martinique.
Popularisé par le groupe Kassav, ce genre musical des années 1980 intègre des rythmes carnavalesques, de jazz, de biguine, de calypso, il peut se danser sur plusieurs styles musicaux.
J’ai pu tester plusieurs types de zouk : le zouk love, le zouk carreau (qui consiste à danser sans bouger les pieds), le zook rétro grâce aux martiniquais lors des soirées.
Quand on parle de zouk, on pense de suite à Francky Vincent, et au folklore, personnellement ce n’était pas une danse que je prenais « au sérieux », mais de la vivre et la ressentir m’a fait changer d’avis. Il faut un vrai lâcher prise pour bien le danser, et bien suivre son partenaire. Chaque danseur a son style et ses origines peuvent influencer ses mouvements. C’est riche et profond et c’est bien plus qu’un simple déhanché qu’on aime caricaturer.
Loin d’être timides pour inviter à se déhancher, là-bas ils dansent tous ou presque. Ou qu’on aille, il y presque toujours un concert live et des gens en train de zooker. Ça peut être sur une piste de danse pleine sous des projecteurs, ou au contraire, quelques couples ici et là dans un cadre plus intimiste dans la pénombre, parfois même un seul couple, mais qu’importe, pas de regard, pas de jugement, le zouk fait partie de leur culture autant que de boire un rhum.
En Martinique, 65% du rhum produit est bu sur place. Il y a neuf distilleries ouvertes au public sur l’île, je n’en ai pas fait une seule, c’est mon seul petit regret, bon par contre, j’ai pu le gouter plusieurs fois. A toute heure de la journée, les ti punch et les planteurs sont une véritable institution. Planteur ananas, mangue, ou même cacahuète, pistache ou café, il y en a pour tous les goûts.
Enfin, j’ai pu découvrir un nouveau sport. Naviguer sur l’eau à la voile grâce au vent m’avait donné envie de sentir de plus près ces éléments via une activité nautique sans moteur. Je suis ravie d’avoir osé franchir le pas pour monter sur une planche et se laisser tracter par le vent, j’ai adoré.
Un petit bémol à la baignade, ce sont les sargasses. Elles rendent bien sur les photos mais elles sont aujourd’hui un véritable fléau. Depuis plusieurs années, la Martinique, comme d’autres îles de la Caraïbe, est confrontée périodiquement aux échouages massifs d’algues sargasses, des algues brunes flottantes. Cette algue gène la pose des filets de pêcheurs, peut nuire à la santé à cause du sulfure d’hydrogène qu’elles rejettent, étouffent les tortues et asphyxient les poissons. De plus, en se décomposant elles dégagent une odeur pestilentielle.
Les services de l’Etat se mobilisent avec les collectivités pour un soutien financier et technique en vue de la collecte et de la prévention des échouages de ces algues. Mais ce phénomène, qui grandit depuis 2011 est une conséquence supplémentaire de la déforestation en Amazonie. La prolifération de ces algues serait due aux rejets de phosphates et de nitrates, au large du Brésil, provenant de l’agriculture intensive et du lessivage des sols en raison du déboisement, notamment de l’Amazonie. Je suis écœurée de voir l’impact de mes yeux et les conséquences que cela engendre.
Le lire à distance c’est facile, le voir et soi même en subir les conséquences c’est différent, et ça me révolte.
Bref, ceci étant dit, voilà un petit résumé des visites et randonnées que j’ai faites que j’ai aimé.
AU SUD DE LA MARTINIQUE
Le Marin
Avec sa baie protégée, son port de plaisance, son port de pêche, son centre de carénage, et ses infrastructures tournées vers le nautisme, Le Marin est surtout une destination prisée des plaisanciers. La marina est la plus grande des caraïbes. La plupart des sociétés de location de bateaux y ont jeté l’ancre. Une petite vie s’est organisée autour de la marina. Commerces, restos et bars rendent l’endroit très agréable ou il fait bon vivre.
Mémorial du Cap 110
En 1830, par une nuit de tempête, un navira a fait naufrage au large du Diamant. Le lendemain, sur près de 300 personnes à bord, on repêcha 46 corps et 86 captifs furent sauvés. Malgré l’interdiction officielle de la traite des esclaves, il s’agissait d’un bateau négrier en provenance du golf de Guinée. A l’occasion du 150è anniversaire de l’abolition de l’esclavage, un sculpteur martiniquais, Laurent Valère a rendu hommage à ces victimes avec des statues tournées vers le Golfe de Guinée (au cap 110). L’endroit est lourd et chargé d’émotion.
Le pire dans l’histoire c’est que les 86 rescapés ont dû être de nouveau déportés en Guyane. Ni esclaves, ni libres, ils n’avaient pas de statut légal, l’administration française ne leur a pas donné leur chance.
Morne Larcher
Un ancien volcan éteint, appelé localement la Femme Couchée parce que l’on distingue les forme du visage et la poitrine.
Rando sportive depuis Anse des Cafards pour atteindre le sommet, sous une chaleur écrasante. La pente est raide, et l’accumulation de feuilles sèches et épaisses n’aident pas à prendre appui. Toutefois, le sommet vaut le coup. A 400 mètres d’altitude le panorama sur Grand-Anse est fantastique, tout comme le rocher du Diamant.
A la fin de la rando on arrive à Petite Anse puis on prend un stop pour manger aux Anses d’Arlet, un village coloré très mignon. Il pleuvait, du coup on a squatté pendant tout l’après-midi au resto l’Oasis, super sympa. Là encore, on a pu passer un peu de temps avec les serveurs et le responsable du resto, moment très agréable. La soirée s’est prolongée dans les environs, d’anse en anse. Grande Anse, Anse de l’âne… on flâne de plage en plage.
Le Diamant
Commune rurale et balnéaire, la baie du diamant offre un spectacle majestueux : une émeraude dans un écrin bleu : le rocher du Diamant, un gros caillou dont les reflets dans l’eau lui valurent ce joli nom.
Trace des Caps
12 heures sont nécessaires pour arpenter les 34 km qui longent de très belles plages, des mangroves, des falaises et la savane des pétrifications. J’ai fait un bout pour arriver à Anse Michel.
La plage a côté de cap Chevalier, juste à côté de l’anse est protégée par une barrière de corail, ce lagon est un site sublime. Une plage de sable blanc bordée de cocotiers, des eaux turquoise peu profondes sans vague, des vents réguliers en font un spot idéal pour les amateurs de planche à voile et de kite.
Sainte Luce
Charmant village de pêcheurs avec des belles plages de sable blanc, et resto de bord de mer.
Forêt domaniale de Montravail
Dans les environs de Saint Luce, la forêt domaniale est facile d’accès, des sentiers parcourent la forêt d’acajou magnifiques dont un grand fromager de 1,70 mètres de diamètre et 45 mètres de haut.
AU NORD DE LA MARTINIQUE
La cascade Saut gendarme
On y accède par un petit escalier abrupt pour déboucher sur un petit pont permettant d’admirer la chute d’eau.
Saint Pierre,
Surnommée « le petit Paris » est l’ancienne capitale de la Martinique et l’ancienne capitale économique des Antilles françaises. Le 8 mai 1902, l’éruption du volcan de la Montagne Pelée détruisit entièrement la ville, 30 000 habitants y périrent, à l’exception d’un individu détenu en prison.
Aujourd’hui la Montagne pelée, le point culminant de l’île, est une rando incontournable. Le volcan reste actif mais endormi, les derniers pics d’activité ont été relevés entre 1929 et 1932.
Quatre sentiers nous permettent d’aller en haut du volcan. Nous avons fait celui par Morne rouge, le plus direct mais pas le plus facile. C’est un sentier tortueux, boueux et instable. C’est un sentier de 4 heures pour 5 km, avec un fort dénivelé.
Nous avons fait la majorité de la rando dans les nuages et dans le vent, mais avons quand eu la chance d’avoir quelques éclaircies qui nous ont permis d’apercevoir furtivement la ville de Saint Pierre. Par contre il y avait tellement de vent que nous n’avons pas pu aller au sommet « Le chinois », trop dangereux et trop glissant.
Le Carbet
Village pittoresque de pêcheurs, réputé pour ses vieilles cases colorées et sa belle plage au sable gris. Beaucoup de familles martiniquaises s’y rendent le dimanche pour se prélasser, pique-niquer et se baigner. On peut y gouter les « patés végétaux », des sortes d’empanadas, un délice.
La Poterie
Le village s’est organisé autour d’une fabrique de brique. Les anciennes maisons, pleines de charme (en bois et en brique) ont été transformées en lieux à visée touristique. On y trouve encore quelques potiers, artisans et boutiques diverses.
En me baladant dans le village j’ai eu l’impression d’avoir remonté le temps. C’était paisible
On a eu la chance de visiter la boutique et l’atelier de Sylvain Filon, un artisan potier qui en plus d’avoir des mains en or, possède un grand sens de l’humour. Nous avons passé un long moment avec lui, Sarah a même pu mettre en pratique les leçons de Sylvain.
La Trinité
Commune réputée pour sa presqu’île, la Caravelle, une réserve naturelle, qui est l’un des sites les plus remarquables de l’île. Il y a deux sentiers en boucle. Le petit tour fait 1 heure pour 1,7 km et le grand tour se fait en 4heures pour 8 km. On traverse la savane herbacée, la mangrove ou la forêt sèche avant de découvrir de magnifiques anses isolées.
Nous avons également pu profiter du marché et faire quelques emplettes.
Quant à Fort de France, la capitale, sur la côte ouest, je n’y suis allée qu’une seule soirée pour rejoindre une amie de Sarah, et passer une soirée.
Pour finir, la Martinique, c’est bien sûr de belles randos et de belles plages, mais c’est surtout une étape qui m’a fait sortir de ma zone de confort et changer mes habitudes de voyage.
Pas d’hôtel, je dors chez des coachsurfeur (hébergement chez des locaux gratuitement), pas de location de voiture, je fais du stop, peu de resto, on cuisine au max et on récupère pas mal de choses auprès d’autres voyageurs qui repartent… Le but premier n’est pas d’économiser, même si je fais attention bien sûr, mais plutôt d’expérimenter un nouveau mode de vie.
J’enfonce une porte ouverte, je suis loin d’être la première, mais dormir chez des locaux et se déplacer en stop, c’est le meilleur moyen de faire de belles rencontres. Je découvre ça tardivement mais je suis contente d’avoir enfin mis les pieds dans ce monde riche, imprévisible, touchant.
Chaque voyage en stop est l’occasion de partager en quelques minutes un bout de vie, un projet, une expérience, une façon de penser, et je ressors toujours de la voiture avec un big smile. Je n’ai pas compté le nombre de chauffeurs qui ont finalement fait des (gros) détours pour m’amener à destination…
Je pense à Marius avec qui j’ai fait plus d’une heure de voiture, qui m’a déposée à l’entrée de mon sentier de rando et qui au passage ma fait le guide touristique, ou encore à Jojo qui m’a proposé de me ramener jusqu’au Marin, après être passé chez lui se doucher et se changer, pendant que j’attendais dans la voiture
Se lever et pas savoir de quoi est faite la journée, ne pas savoir où on dort le soir même, ni où on mange, ni comment se rendre à un endroit… Le résultat c’est que ça se passe, et ça se passe bien, et même souvent très bien. Il y a tout ce qu’il faut sur le chemin et j’ai pu découvrir l’île d’une bien jolie façon.
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